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Du 12 au 18 juin - Court-métrage

Un court avant le long

Pour de vrai, La Traviata et Lucky Man, trois courts-métrages à découvrir dans votre cinéma du 11 au 18 juin 2024.

Une femme, bouleversée erre chez elle, paralysée par son impuissance. Elle est totalement accaparée par sa petite voix intérieure qui répète toujours les mêmes mots d’amour fou pour son enfant endormi, et l’obsession de sa culpabilité de n’avoir pu éviter la chute fatale. Il y a quand même un truc qui cloche dans tout ce désespoir…

Découverte par Gaspar Noé (dans Carne et Seul contre tous), Blandine Lenoir est passée à la réalisation dans les années 2000 et a depuis enchaîné plusieurs réalisations, avec toujours beaucoup d’énergie et de vivacité. Sa rencontre avec Nanou Garcia pour Dans tes rêves s’avère décisive, celle-ci apportant son irrésistible fantaisie à l’univers plutôt ‘rock’ de la réalisatrice. Après Ma culotte, elles co-écrivent ainsi Pour de vrai, qui s’impose incontestablement comme une des plus belle réussite de sa filmographie (en court métrage). Elle a ensuite réalisé quatre longs longs métrages dont Juliette au printemps.

« L’émotion palpable du début du film semble tout à coup dérisoire au regard de son dénouement, laissant une étrange sensation d’inconfort et de manipulation, et ce détournement du vocabulaire narratif est si parfaitement maîtrisé qu’au-delà de la finesse de l’écriture et de l’interprétation, le film constitue un véritable exercice de virtuosité. » Arnauld Visinet, Bref n°81, 2007.

Scénario Nanou Garcia, Blandine Lenoir Musique Bertrand Belin Interprétation Anaïs Demoustier, Anita Le Masne, Nanou Garcia, Bertrand Belin Production Local films, Local Films


  • La Traviata (Noi siamo zingarelle), de Guionne Leroy, devant les projections de Gloria !

Même la tragédie de la Traviata n’empêche pas les bohémiens de la haute société parisienne de faire la fête dans le château.

L’illustre opéra de Giuseppe Verdi, créé à Venise en 1853, trône au centre de ce film court qui fêtait ses trente ans en 2023. C’est une copie restaurée et numérisée par L’Agence du court métrage que le public peut aujourd’hui (re)découvrir. Une remise à neuf idéale pour célébrer cette symphonie de couleurs en pâte à modeler, due au talent de la réalisatrice Guionne Leroy, également animatrice au sein de grands studios internationaux.

Ces trois minutes se délectent de la première à la dernière image. C’est l’histoire d’une métamorphose d’aliments sucrés en personnages dansants, ou comment une table de desserts en tous genres se transforme en bal improvisé, jusqu’à une épiphanie mutuelle où la couleur enjolive de détails multicolores un gros gâteau blanc à plusieurs étages. Attention, gros risque d’appétit ou d’overdose de sucre !

Les mouvements rythmiques de la mélodie italienne, interprétée par le Chœur de l’Académie Santa-Cecilia de Rome, donnent le tempo de la marche et de la danse. Comme dans une comédie musicale hollywoodienne, la chorégraphie est optimale, jusqu’à se clore par un final géométrique en vue plongeante sur les créatures animées. Du grand art !

Scénario Guionne Leroy Production Pascavision


 Un homme joue et gagne. Il est euphorique, mais… Autre jeu, autre joueur gagnant. La nature manifeste sa présence. Au final, l’éloge de la lenteur.

Bel univers graphique que celui de Claude Luyet. Ce réalisateur d’animation suisse livre de véritables pépites depuis plusieurs décennies, d’un portrait d’un boxeur – Le carré de lumière – à cette plongée envoûtante qu’est Lucky Man. Il revisite ici le film noir et la figure du serial-killer, en quatre minutes. Une plongée dans le cinéma de genre qui lui réussit totalement.

Les ombres, toujours, caractérisent son univers. Celles du tourment, de l’angoisse ou de la mélancolie. Ici, elles sont réhaussées et magnifiées par un travail savant sur le noir et blanc. Le grain, gras, est ultra graphique et colle à l’univers du film, qu’on imagine situé en Californie, au Texas ou au Nouveau-Mexique. Dans une Amérique fantasmée, en tout cas, avec les villes fictives de Dorkville et San Felice.

L’humour n’est pas en reste, dans ce film taiseux pourtant très sombre, où un heureux gagnant au jeu se voit coupé dans son élan victorieux par un pompiste patibulaire et fatal. Les “36 Hills” – soit 36 collines – du nom de la station vont trouver une résonance particulière avec la réalité du récit. Quant à la pirouette finale, elle emprunte presque au film catastrophe. Bien vu !

Scénario Claude Luyet, Thomas Ott Musique Balz Bachmann Production Studio GDS

L’Extra Court